La Boxe Française est née au 19ème
siècle du Chausson et de la Savate :
Historique
La Boxe Française est née au 19e siècle du Chausson et de la Savate. Ces deux
méthodes trouvaient leur source dans l'enseignement des maîtres d'armes et
bâtonistes d'autrefois, dont les techniques étaient sans doute elle-mêmes issues
de l'antique Pancrace grec. L'escrime influença aussi grandement la Boxe
Française.
La Savate se composait de tous les coups utilisables en combat de rue :
percussions de la tête, des mains, des poings, des avant-bras, des coudes, des
genoux, des jambes et des pieds auxquelles venaient s'ajouter des techniques de
saisies, de clés, de ramassements, de passements de jambes ou d'enfourchements,
complétées d'immobilisations et de projections. Certains la font remonter à
certaines luttes celtiques pratiquées dans le pays, qui consistaient
essentiellement en des échanges de coups de pieds donnés dans les tibias. Batist,
un danseur qui avait étudié la Savate à la cour du duc du Berry au 18e siècle, y
incorpora des techniques de coups de pieds hauts. Les maîtres de Savate de
l'époque étaient tous des gens de basse extraction : Karp, Minion, Rauchero,
Sabatier, Fanfan, Fransua, Champan, etc.
Le Jeu de Marseille ou Jo de la Sabato était un jeu d'adresse acrobatique prisé
à Marseille dès le 16e siècle ; des compétitions opposaient des adversaires qui
devaient se toucher de la pointe du pied au-dessus de la ceinture. Disparu du
midi de la France, le Jo de la Sabato resta longtemps encore une discipline
populaire en Italie sous le nom de "Savate Genovese". Les marins du sud-est de
la France étaient friands du Jeu de Marseille, qu'ils adaptèrent à leurs besoins
: ils se mirent à utiliser fréquemment des coups de pieds hauts dans leur
bagarres, prenant appui avec leurs mains sur le sol.
La Savate fut la première des deux méthodes à arriver à Paris. De part son
aspect très réaliste, elle était très prisée des basses classes de la population
; elle était également pratiquée par certains jeunes nobles désoeuvrés. Les
membres de la haute bourgeoisie, eux, rebutaient à se mélanger avec le "bas
peuple". La Savate se sépara donc en deux branches. La première, "classique",
devint la méthode de combat de prédilection des prolétaires et des criminels de
tout poil, qui y ajoutèrent des techniques de combat de rue (ce qu'on nommera la
"Lutte Parisienne") et lui associèrent le maniement de certaines armes telles
que les bâtons, les cannes, les couteaux. La branche "romantique" de la Savate,
préférée de "l'élite" car moins frustre (et moins proche de la réalité du
combat...), ne se pratiquait pas dans la rue mais sur les parquets des salles
d'entraînement. Cette forme de Savate se maria naturellement avec le Jeu de
Marseille, arrivé à Paris dans les années 1820. Cela donna naissance au Chausson
(terme employé dès 1829), connu également sous les noms de Chausson Marseillais
ou Chausson provençal, qu'on pratiquait des chaussons aux pieds et des gants aux
poings (pour éviter de s'abîmer les mains... et le visage des riches
pratiquants). Le Chausson fut très populaire sous le règne de Louis-Philippe
(1830-1848).
Ancien bagnard proche des milieux de la pègre, François Vidocq, qui connut par
la suite une carrière mouvementée dans la police qui le conduira à occuper le
poste de Chef de la Sûreté de Paris jusqu'en 1827, se serait initié aux
techniques de la Savate alors qu'il était détenu à la prison de Bicêtre. Il y
eut pour maître Jean Goupil, dit " le Saint-Georges de la Savate ". Vidocq et
ses auxiliaires contribuèrent sans doute à faire de la Savate une discipline
majeure dans la formation au combat de l'ensemble des policiers de la capitale.
La
Boxe Française moderne doit beaucoup à Michel Casseux (1794-1869) dit Pisseux,
qui fut l'un des premiers à tenter d'unifier ces techniques qu'il avait observé
dans les barrières de Paris, cabarets, bals et bouges de toutes sortes. Il
écrivit un traité à ce sujet, intitulé L'Art de la Savate. Son système était
basé sur des coups de pieds de face, de côté et circulaires, visant tibias,
chevilles et genoux. Les mains conservaient une position basse, pour parer les
coups à l'entre-jambe et saisir la jambe de l'adversaire, mais pouvaient de
façon opportune lancer une attaque de la paume au visage (coup de la musette).
Casseux préconisait également l'utilisation des cannes et autres coups-de-poings.
Il ouvrit une salle d'entraînement en 1825 à la Courtille et devint si populaire
que tous se précipitaient à ses cours, prolétaires comme bourgeois. Le Duc
d'Orléans et Lord Seymour (dit Milord l'Arsouille, fondateur du Jockey Club)
furent ainsi de ses élèves.
Jean-Antoine Charles Lecour (1808-1894), un de ses élèves, ouvrit sa propre
école en 1830. Il n'appréciait pas le côté "combat de rue" de la Savate telle
que la pratiquait les voyoux, et se mit à sélectionner ses élèves. Après avoir
été défait par Owen Swift, un boxeur à mains nues, il prit conscience de
l'avantage que procurait à la Boxe Anglaise l'utilisation du poing pour frapper,
quand la Savate utilisait surtout les mains pour bloquer, parer et frapper. Il
prit donc des cours de Boxe Anglaise avec Jack Adams et ajouta des techniques
qui en étaient issues à son enseignement, qu'on commença à appeler Boxe
Française en 1832. Une autre influence fut celle de l'escrime, dont il était
maître (à l'épée comme à la canne). La position de garde, les parades, les
attaques lancées en avançant la jambe avant, étaient celle de l'escrime. De même
que dans cette dernière, on insistait plus en Boxe Française sur la vitesse et
la précision des coups que sur la force pure. Alexandre Dumas, élève de Charles
Lecour, écrivait dans Filles, lorettes et courtisanes :" Charles Lecour commença
par enseigner la savate... Il rêvait donc jour et nuit de perfectionner cet
art... Il entendit parler de boxe... La boxe est la savate de l'Anglais... Dans
la savate, le Parisien avait fait de la jambe et du pied les agents principaux
ne considérant les mains que comme arme défensive. Charles Lecour rêva de cette
grande entreprise, cette splendide utopie, ce suprême perfectionnement de fondre
ensemble la boxe et la savate." Théophile Gautier ajoutait dans la presse : "Le
16 août 1847, Monsieur Charles Lecour a réduit en art cette escrime de truands,
cette boxe de la cour des miracles... Avec cet art, plus de surprise nocturne ;
on peut oublier sa canne, ses pistolets de poche, mais l'on oublie jamais ses
jambes ni ses bras..."
Peu
après l'ouverture du gymnase de Lecour, arrivèrent à Paris deux enseignants de
Savate : Loze, de Toulouse, et Leboucher, de Rouen. Les deux hommes avaient
développé des méthodes semblables à celle de Lecour : garde relevée, poings
serrés, coups de pied hauts. Leboucher enseignait dans le quartier du Faubourg
Montmartre une méthode dite "du voyageur", qui permettait d'apprendre rapidement
à se défendre ; il maîtrisait également toutes les techniques vicieuses de la
Lutte Parisienne. Son élève Théophile Gautier en donnait quelques descritptions
en 1840 dans son Le maître de chausson :"Si votre adversaire court sur vous,
vous placez le coup de tête dans l'estomac, vous lui saisissez en même temps les
deux jarrets pour le renverser ; quelquefois, comme une arabesque fantastique,
comme ces paraphes à main levée que l'on fait au bout d'une page dont on est
content, vous le faites passer par-dessus votre tête, et vous l'envoyez en
manière de 'fioriture', décrire une parabole derrière vous."
C'est grâce à ce noyau d'instructeurs de qualité que "l'école de Paris" marqua
sa supériorité sur celle de Marseille ; en effet le Chausson utilisait également
les coups de poings, mais aussi des coups de pieds plus hauts que ceux de la
Savate et qui atteignaient plus difficilement leur cible, les postures des
pratiquants étant souvent peu adéquates. Charlemont dira d'ailleurs de cette
méthode : "Face à un sport systématique sérieux, l'école de Marseillais ne
pouvait pas supporter la comparaison ; elle est bonne, si on veut, pour faire de
la gymnastique, de la danse, des clowneries, mais pas pour le combat et la
défense".
La Boxe Française connut sa période de gloire dans les années 1840 et 1850.
Charles Lecour et son frère Hubert organisèrent des matches publiques au Cirque,
Leboucher à la salle Montesquieu. Certains pratiquants connurent une grande
renommée : Curel, Tessier, Ducros, Rambaud "la Résistance", Vigneron "l'Homme
Canon"... Né à Paris en 1827 Louis Vigneron, qui était d'une force prodigieuse,
était devenu célèbre grâce à un exercice de foire qui consistait à tirer un coup
de canon à partir d'une pièce d'artillerie qu'il portait sur son dos. Cet
exercice lui fut fatal le 22 août 1871.
L'essor de la Boxe Française fut cependant stoppé dès 1956, lorsque la police
interdisit les techniques de lutte parisienne (coups de tête, de genou, de
coude, de paume, projections). La salle Montesquieu fut transformée en
restaurant, et Leboucher renonça à organiser des rencontres. La boxe se réduisit
alors à son enseignement dans de petits gymnases.
Un renouveau apparut avec l'arrivée dans le monde de la Boxe Française de Joseph
Pierre Charlemont (1839-1914), né à Lesdain, dans le Nord. Il avait fait son
apprentissage de boxeur au bataillon de Joinville (la Boxe Française était
enseignée à l'armée depuis 1940, et la méthode de Joinville naquit avec l'école
en 1852) et commença à enseigner en 1862 la boxe et de canne auprès du 19e
bataillon de chasseurs. C'est là qu'il mit au point une nouvelle méthode apprise
lors de son séjour à Paris (notamment avec Charles Lecour). Il s'entraîna dans
l'école de Vigneron, et lui succèda comme champion de Savate après un dernier
assaut qu'ils disputèrent le 8 décembre 1867. Engagé activement au côté des
Communards, il s'exila en 1875 à Bruxelles où il créa une école. Il écrivit à
cette époque son premier ouvrage, La Boxe Française, Traité Théorique et
Pratique (1877). En 1887, il fonda à Paris, dans le quartier de Pigalle,
l'Académie de Boxe Française à Paris, qu'il légua à son fils Charles en 1899. Il
publia à cette date l'ouvrage intitulé La Boxe Française, historique et
biographique, souvenirs, notes, impressions, anecdotes.
Les Français, qui considéraient leur boxe supérieure à celle des Anglais,
organisèrent une rencontre qui devait décider une fois pour toutes quelle
méthode était la meilleure. Un combat mouvementé opposa donc le 28 octobre 1899
Charles Charlemont et Jerry Driscoll, un ex-champion de boxe de la marine
anglaise. Au 1er round, Driscoll se plaignit d'avoir été mordu par Charlemont,
et le match fut interrompu pendant plusieurs minutes. Peu après sa reprise, le
combat cessa à nouveau pour une raison inconnue et l'arbitre (un Français !)
annonça vouloir le faire cesser ; mais les deux boxeurs le persuadèrent du
contraire. Finalement, le match prit fin au 8e round, Driscoll ayant reçu un
coup de genou au bas-ventre... Ce qui fit dire à l'arbitre anglais B. J. Angle,
dans son livre My Sporting Memories (1925) : "Driscoll ne savait pas à quoi il
s'engageait [lorsqu'il accepta] de rencontrer le Français à son propre jeu..."
Le boxeur anglais, qui estima qu'il s'agissait d'un accident, n'en tint pas
rigueur à Charlemont.
A la fin du 19e siècle, la Boxe Française, devenue de plus en plus académique
sous l'influence de l'école de Joinville-le-pont (fondée en 1852 dans le but
d'uniformiser l'ensemble des pratiques martiales militaires du pays) et de
Joseph Charlemont et de son fils, fut de moins en moins pratiquée. L'aspect
gymnique avait prit le pas sur l'aspect martial ; d'ailleurs, la partie
self-défense de la Boxe Française, la Lutte Parisienne, avait été complètement
délaissée dans l'enseignement. Les deux guerres mondiales, qui virent la
disparition de nombreux pratiquants, lui furent fatales et ce sport national
faillit disparaître.
Il fallut attendre 1946 et le remplacement des assauts à la touche par de
véritables combats pour que la Boxe Française retrouve sa popularité. En 1965,
Pierre Baruzi organisa le Comité National de Boxe Française, qui devint par la
suite Fédération Nationale. La Fédération Internationale de Boxe Française
Savate fut établie en 1985.
Technique
Les techniques de poings sont, comme en boxe anglaise, le direct, le crochet et
l'uppercut, qui utilisent des mouvements en "jeté direct", ainsi que le swing,
qui utilise un mouvement en "balance".
Les principales techniques de jambes sont le fouetté (coup circulaire fouettant,
hanches de profil à l'impact), le chassé latéral (coup pénétrant, hanches de
profil à l'impact), le chassé frontal (coup pénétrant, hanches de face à
l'impact), le revers latéral (coup circulaire retourné, hanches de profil à
l'impact), le revers frontal (coup circulaire retourné, hanches de face à
l'impact), le revers fouetté (coup circulaire retourné, avec flexion de la jambe
à l'impact), le coup de pied bas (coup écrasant, visant le tibia).
Ces coups de pied peuvent être portés à trois niveaux : ligne haute (à la tête),
médiane (dans le ventre) ou ligne basse (dans les jambes). On les exécute de
cinq manières différentes : sautés, croisés, tournants, latéraux ou frontaux.
Il y a trois types d'esquives : totales (par déplacement des deux appuis),
partielles (par déplacement d'un seul appui) et sur place (retrait de la surface
visée sans déplacement des appuis).
Il existe également trois catégories de parades : bloquées arrêtant le coup dans
son mouvement, chassées accompagnant ou repoussant le coup afin de le dévier de
sa trajectoire initiale, en protection placées sur la surface de frappe visée.
Les tireurs (boxeurs) portent une tenue intégrale, des gants et des chaussures.
Le niveau des tireurs (boxeurs) est formalisé par des bandes de couleur apposées
sur le bord des gants ; dans l'ordre croissant : gant bleu, gant vert, gant
rouge, gant blanc, gant jaune. Pour les grades plus élevés, soit le tireur se
consacre à la technique et vise le gant d'argent (12 degrés délivrés par la
fédération), soit il pratique la compétition et vise le gant de bronze
compétition puis le gant d'argent compétition (3 degrés). Le gant vermeille et
le gant d'or sont des grades honorifiques.
Il existe trois formes de compétition :
L'assaut : rencontre opposant deux tireurs de même sexe et de même poids,
qui se juge sur la maîtrise technique, le style, la précision des touches dont
toute puissance doit être exclue.
Le combat : rencontre opposant deux tireurs de même sexe et de poids
identique, qui se juge sur la technique, la précision, l'efficacité des coups et
la combativité des tireurs. Les coups sont portés avec toute la puissance. La
coquille et le protège-dents sont autorisés.
Le pré-combat : on rajoute le casque et les protèges tibias.
Les catégorie de poids sont : mouche (51-53,5 kg), coq (53,5-56 kg), plume
(56-58,5 kg), super-plume (58,5-61 kg), léger (61-63,5 kg), super-léger (63,5-66
kg), mi-moyen (66-70 kg), super-mi-moyen (70-74 kg), moyen (74-79 kg), mi-lourd
(79-85 kg), lourd (+ 85 kg).
En compétition, les combats se déroulent en 4 ou 5 reprises de 2 minutes pour
les juniors et 3 minutes pour le seniors, sur un ring (enceinte carrée de 4 à 6
mètres de coté). Les décisions sont : victoire par hors combat (K.O.) ou "aux
points", match nul ou non combat.
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